mercredi 4 mai 2011

Education ou instruction ?

Lorsque un sénateur (UMP) explique que l'éducation n'est pas une dépense, mais un investissement, on ne peut que s'accorder avec lui. En effet, lorsque l'on pense que l'éducation est la base de toute société, de tout bon fonctionnement d'un groupe ou d'un autre, il faut dire qu'un investissement  - qui se fait sur l'avenir, par définition- n'est pas à rejeter, bien au contraire.
Malgré tout, avant de parler de dépense/investissement ou autre, je crois qu'il faut "philosopher" sur deux questions qui me semble importante. Le rôle de l'État est-il de fournir l'éducation ou l'instruction ? Faudrait-il ajouter "raisonner" à la liste de ce que doit savoir faire un Français à sa sortie du système scolaire ?

Crédit : A Contre Courant

  • Education ou instruction ?

Avant de faire un choix entre "éducation" ou "instruction", il est nécessaire d'en poser les définitions afin d'être certain que l'on se comprenne bien, que l'on parle de la même chose. Pour faire dans l'officiel, j'ai pris les définitions du Dictionnaire de l'Académie française. Pour les deux termes, j'ai choisi de prendre la première proposition.
Pour "éducation", nous comprendrons l'action d'élever, de former, d'instruire (prodiguer un enseignement, des leçons, des préceptes à quelqu'un) une personne (enfant, adolescent, adulte) en cultivant ses qualités physiques, intellectuelles et morales. Pour "instruction", nous entendrons l'action de transmettre à quelqu'un des connaissances ou des principes nécessaires à son éducation.

De ces deux définitions, on voit bien que les deux notions sont liées, qu'elles ont tendance à s'imbriquer et presque à se valoir. Toutefois, de ce que je comprends de ces définitions, l'éducation serait plutôt un tout tandis que l'instruction serait plutôt partie de ce tout.
Partant de là, je serais - sauf si on m'explique le contraire - partisan du fait que l'État doit fournir l'instruction en particulier et non l'éducation en général. En effet, je pense que sa mission n'est pas de "façonner" entièrement les personnes, mais de les aider en leurs fournissant le matériaux (les connaissances) et les outils (les principes) pour que ces personnes puissent se forger une opinion personnelle.

C'est une première question d'interprétation que je propose à votre réflexion.

  • Lire, écrire, compter et raisonner

Le mardi 1er mars 2011, l'Institut de France était réuni pour une séance solennelle autour des nouveaux défis de l'éducation. Dans ce cadre, Pierre Léna (Membre de l'Académie des sciences, Délégué à l'éducation et à la formation de 2006 à 2011) a pris la parole pour un discours intitulé "La science en héritage". C'est la conclusion de son propos qui est ici intéressante.
« Notre Académie propose à notre école primaire, et à son ministre, d'adopter désormais "Lire, écrire, compter, raisonner" comme les quatre fondamentaux de l'école du vingt-et-unième siècle. Dans sa lettre aux instituteurs de 1883, Jules Ferry avait fait des trois premiers un programme politique. Pourquoi ne pas accepter le défi du quatrième, et le mettre en œuvre avec les mathématiques et les sciences de la nature, écoles privilégiées du raisonnement ? »


Voilà un grand défi à relever ! Faire en sorte qu'une personne sortant du système scolaire soit capable de réfléchir par elle-même sans se baser sur des réflexions préconçues. C'est même l'un des buts qui anime les cours de philosophie en classe de Terminale. Mais tout le monde ne choisissant pas la filière générale, l'enseignement d'un tel outils qu'est la réflexion, il est nécessaire de faire en sorte que chacun puisse y avoir accès plus tôt : dès le collège par exemple voir dès les dernières classes de l'enseignement primaire.
Toutefois, il faut bien reconnaître que les trois fondamentaux actuels ne sont pas une réussite complète. En effet, aujourd'hui encore des personnes sortent du système scolaire sans savoir lire, écrire ou compter un minimum. Pour cela, à qui incombe la faute ? Je ne sais pas, mais ce que je sais, c'est qu'il faut y remédier - en fixant clairement des méthodes (eh oui, le changement fréquent des méthodes d'apprentissages n'aide personne !) - et pourquoi pas tenter de faire de "raisonner" un quatrième volet d'une politique en matière d'éducation, d'instruction.


Voilà une deuxième question que je vous propose dans le cadre d'une réflexion globale sur l'éducation et l'instruction.

6 commentaires:

  1. Je suis d'accord avec toi (heureusement) sur le rôle important que doit jouer l'éducation/instruction. Par contre, je trouve assez contradictoire de refuser le rôle de "façonnage" de l'EN tout en voulant qu'elle apprenne aux enfants à raisonner. Un lycéen n'est jamais mieux conditionné qu'en cours de philosophie.

    Apprendre aux enfants à raisonner, je ne suis pas d'accord. Je ne vois pas comment un collégien peut philosopher. Il faut une certaine sensibilité, de l'expérience, de la raison. Et à 13 ans, on n'a pas encore ces qualités.

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  2. Je ne parle pas que de philosopher, je parle également de raisonner dans le sens par exemple de la logique : savoir (au moins à peu près) structurer une réflexion à la sortie du collège me parait être un bon objectif. Est-ce plus clair ^^ ?

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  3. Je suis tout de même pour une progressivité apparente dans les étapes de l'apprentissage de la réflexion. Même en mathématiques, au collège (et a fortiori au lycée), aucune réflexion n'est demandée, et il serait difficile d'en attendre plus d'un collégien. Pour raisonner, aussi bien en philosophie qu'en mathématiques, en logique, en histoire..., il faut déjà un socle complet. D'où le triptyque lecture-écriture-calcul, à mon goût.

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  4. Ce qui est demandé au collège - en tout cas on me le demandais - c'est de savoir appliquer une méthode de raisonnement que je qualifie maintenant de juridique : majeur, mineur, conclusion.

    On est d'accord sur le fait qu'il faut tout d'abord avoir la maîtrise du socle-triptyque de méthode pour pouvoir engranger des connaissances, c'est indéniable.
    En revanche, le cran suivant est bien "raisonner" selon moi et je pense qu'on doit le maîtriser un minimum à la sortie du collège.

    La philosophie est pour moi un autre niveau qui mérite de déjà savoir raisonner (de la façon que l'on souhaite et c'est là que je refuse le formatage : chacun à une manière favorite pour raisonner). C'est avec la philosophie que l'on mêle les connaissances engrangées et le raisonnement pour se faire une idée. Je me trompe ?

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  5. Non, tu ne te trompes pas !

    Pour la philosophie, ce que je trouve dommage dans le système français, c'est de n'en faire qu'une seule année, en fin de lycée. Ce qui serait plus raisonnable, à mon sens, serait de commencer dès la première, pour avoir un meilleur recul sur les œuvres principales, les idées fondamentales... Et ainsi, la matière pourra servir à apprendre à raisonner, et plus seulement à savoir replacer des citations dans un plan prémâché.

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